Mon histoire, tout le monde la connait. Je suis fille de Breen Lennartson. Mais surtout la fille de la Völva Solvejg Alwindòttir. Je naquis il y a 31 années dans le doux foyer, aimant et aimé, des fjölkunnig du village de Tromsø. Dans notre famille, les femmes se transmettent leur pouvoir depuis nombre générations. La magie runique, le chamanisme, les enchantements et surtout la prophétie m'ont été appris par ma mère qui les tenait de la sienne. Nous sommes respectées de tous et personne n'a jamais mis en doute notre réel pouvoir et le lien que nous avons avec les déités. Nous ne sommes nullement supérieures à d'autres mais nous sommes loin de leur être inférieures. J'ai en moi une foi sans égal aux Dieux car c'est d'eux que viennent notre pouvoir. Je possède une dévotion sans égal à la grande Freyja qui est selon moi la mère de la magie. Depuis le décès de mon aimée génitrice, j'exerce mes devoirs de Völva humblement et discrètement. J'ai toujours détesté l'étalage. Que ce soit d'ordre statutaire ou d'ordre personnel. J'aime ce que je fais et je le ferais jusqu'à ma mort. J'ai conscience d'être une jeune prophétesse et j'ai conscience que je suis encore bien loin de tout savoir à ce sujet c'est pourquoi j'étudie encore chaque jour, aussi bien dans les écrits de mes ancêtres que dans les situations auxquelles je dois faire face.

Ma famille fait partie des plus riches du village, car notre travail, si on peut le nommer ainsi, est grassement rémunéré. Malgré ça, je ne fais pas étalage de mes richesses et je suis, je crois, une âme charitable jamais lésineuse de léguer quelques pièces de monnaie aux plus démunis. J'exerce d'ailleurs, sans prétention, les arts de la médecine et de la guérison. A l'aide des plantes, des Dieux et de diverses rituels, je prends plaisir à soigner nos valeureux guerriers rentrant de mission. Je ne suis pas payée pour ça, et je ne souhaite pas l'être, mais j'en suis souvent pleinement remerciée de toutes autres façons. Un sourire de reconnaissance comblant suffisamment mon âme.

J'ai un frère du nom de Lennart Breenson. Il est plus jeune que moi et je l'aime comme personne. Nous sommes les derniers descendants de Breen et notre amour est aussi grand que celui de tous nos ancêtres réunis. Malgré tout, il renie un peu notre nom. Il est contre l'héritage völva et est persuadé que c'est une pratique qui va à l'encontre des Dieux et que nous nous mettons un peu trop à leur place quand nous nous appliquons à faire de la magie ou à prédire des événements futurs. Depuis, il refuse de remettre un pied chez nous. Nous ne nous voyons que peu et j'en souffre.
Le mal dont je souffre le plus c'est d'ailleurs sûrement la solitude de n'avoir nul foyer. Nul homme, nul enfant et nul famille. Je me contente donc de mon statut.

Je pense désormais que vous en savez assez sur moi et ma famille. Mon histoire est ainsi. Ou du moins c'est telle que tout le monde la connait. Après tout nous avons tous des secrets. J'en ai un. Il n'a en soi plus énormément d'importance mais il ne me quittera jamais. Vous voulez que je vous le raconte ? Je ne sais pas si c'est une très bonne idée, mais soit. Je vais faire un effort. Installez-vous bien.

Il y a de ça 24 ans, alors que je me promenais dans la forêt mitoyenne à Tromsø, je fis une étrange rencontre. Une rencontre fort incroyable qui resta gravée en moi toute ma vie. Je ne l’oublierais jamais, ha ça, non jamais. Si vous avez fait le calcul, j'avais à l'époque 7 belles années de vie. J'étais épanouie, je courrais partout. Je jouais avec des épées en bois avec mon petit frère. Car oui, depuis mon plus jeune âge, je n'avais toujours aspiré qu'à devenir une valeureuse guerrière. Malheureusement, les Völva ne font pas la guerre. Et encore moins si elles n'ont encore transmis leur mystique héritage à personne. Mais passons outre. J'ai fait mon deuil de cette ambitieuse aspiration. Désormais, je ne m'entraîne à l'épée que dans mon jardin, la nuit tombée. Personne n'est au courant, si ce n'est mon frère avec qui je m'entraîne parfois. J'aime aussi tirer à l'arc dans les bois et c'est d'ailleurs ce que je faisais ce fameux jour de mes 7 ans dans les bois. Je tirais sur un gros chêne où j'avais dessiné une croix rouge. Je me débrouillais pas si mal, c'était mon père qui m'avait appris. C'était un bon soldat, le Jarl l'emmenait toujours en raid.
Ce jour-là, je me souviens qu'il neigeait. Vous me direz, ce n'est pas quelque chose de rare à Tromsø mais, cela faisait que la forêt était entièrement blanche. Aussi, il me fallut plusieurs minutes pour m'apercevoir qu'une longue chevelure blanche traînait dans la neige. Un petit garçon recroquevillé sur lui-même, assis par terre. Je ne le reconnaissais pas et pourtant j'étais persuadée de connaître tous les enfants du village. Je suis donc approchée doucement et me suis accroupie à ses côtés. De jolies petites oreilles en pointes perçaient sa chevelure. C'était un jeune elfe. Et je ne doutais pas qu'il venait d'Alfheim. « Dis, tu es perdu ? » Il avait sensiblement le même âge que moi. Ou du moins, il avait l'apparence d'un petit de 7 ans, même si il en avait sûrement quelques décennies de plus. Le petit être pleurait. Cela avait brisé mon jeune coeur.
Après plusieurs heures en sa compagnie, sa langue s'était déliée. C'était en effet un elfe de lumière d'Alfheim. Il s'était égaré près d'Yggdrasil et avait franchit une porte au hasard, par inadvertance. Il ne savait pas encore bien maîtriser son invisibilité et s'était réfugié en forêt pensant que personne ne le retrouverait. Je n'avais aucune idée de comment faire pour ouvrir la porte d'Alfheim. Mais bien heureusement, sa mère ne mit pas longtemps à venir chercher son petit.
Elle fut d'une immense gratitude envers moi d'avoir pris soin de lui.
Seraën. C'était son prénom. Une magnifique elfe blanche à la voix sucrée.
En guise de remerciement, Seraën me fit un cadeau d'une très grande valeur. Elle m'offrit un arc et des flèches forgées à Alfheim. Les elfes étant de très grands archers, je me fis la promesse d'honorer son offrandes en devenant à mon tour une très grande archère. Quant à moi, j'offris au petit elfe mon arc et mes flèches. C'était plus un cadeau sentimental qu'avec beaucoup de valeur mais il me promit de lui aussi devenir un grand archer. Je n'en doutais pas.

C'est une belle histoire n'est-ce pas ? Quoi qu'il en soit, elle restera toujours dans mon coeur et je prie les Dieux pour qu'un jour j'ai la chance de revoir le petit elfe et la grande Seraën.
Mais je n'ai plus trop le temps d'y penser. A Midgard, on a jamais le temps de s'ennuyer, parce que ces derniers temps, les Dieux nous ont laissés un peu seuls. Ils ne répondent plus autant à nos prières. Voulaient-ils nous tester ou bien sont-ils juste autant enlisés dans les problèmes que nous ? Certes, nous avons eu un retour réconfortant de nos guerriers qui sont arrivés les drakkars tout plein d'or. Après l'attaque Jötun, il nous fallait au moins cela pour nous relever et nous redonner le sourire. Et surtout pour nous redonner foi. Foi en nous. Foi en l'avenir. Moi j'ai grand espoir pour de beaux jours à venir. Je suis un peu triste de ne pouvoir prendre part aux raids et aux batailles. Mais je suis persuadée que le dragon ne nous arrêtera pas. Des pertes humaines, nous en avons déjà essuyées bon nombre. Des pertes forestières, ce n'est pas bien grave au fond. Nos hommes le vaincront comme ils ont vaincu leurs précédents ennemis. Je n'ai pas peur de l'avenir. Je suis une völva et ce sont des choses que je sens, c'est peut-être la seule chose à laquelle je sers dans de pareils cas; rassurer les troupes et les empêcher de partir à une mort assurée. Les corbeaux ne m'apportent pas de mauvaises nouvelles ces temps-ci. Enfin, mis à part la prophétie des 9. Mais cela c'est encore autre chose. Tant que nous ne franchissons pas les portes, je pense que nous ne risquons, pour le moment, pas grand chose. Dans tous les cas, les Dieux sont bons, et dans le cas où nous n'arriverions pas à surmonter ces durs épreuves, je ne doute pas qu'ils seront là. La foi est la clé.

C'est tout bon, merci pour les modifications

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